Aucune méthode clés en main ne permettait de jumeler notre approche prospective et participative, en l’appliquant à de grands défis systémiques posés à une échelle provinciale… et le tout, en virtuel! Mais en combinant les forces de différents horizons (backcasting, approches orientées changement, transition management, etc.), nous avons structuré une méthode en 4 étapes.
LES ÉTAPES
FUTURS POSSIBLES
FUTUR SOUHAITABLE
CHEMINS
PARTAGE DES SAVOIRS
Cette méthode a été utilisée successivement sur chacun de nos 3 défis (d’abord, le numérique, puis l’alimentaire et enfin le territoire), ce qui nous a permis de la tester et de la renforcer au fil du temps.
Futurs possibles
L’objectif de cette première étape est d’ouvrir notre champ de vision afin d’explorer tout ce qu’on peut déjà anticiper comme futurs possibles.
Comment on s'y prend?
- Chercher dans la littérature les tendances d’évolution possibles répertoriées par différentes sciences et savoirs. Pas toujours facile de trouver ces « ingrédients du futur » au Québec! Nous profitons de cette étape pour documenter notre point de départ en 2020, sous forme de « constats », et les principaux enjeux de mises en œuvre ou points de tension à venir, que nous appelons des « nœuds du futur ».
- Partager le fruit de ces recherches à des groupes d’expertes et d’experts diversifiés pour les valider et les enrichir de « signaux faibles », qui sont des tendances plus émergentes mais qui pourraient prendre de l’ampleur à l’avenir. Entre 20 et 60 d’entre eux ont été réunis à cette étape, selon les défis. Cette étape a été écourtée dans le cas du défi numérique, encore très peu documenté en 2020.
- Combiner différentes tendances d’évolution pour créer 4 différents futurs possibles pour chaque défi, très contrastés les uns des autres, en s’appuyant sur une méthodologie rigoureuse, appelée « l’analyse morphologique ». Cette méthode nous amène à faire des combinaisons d’hypothèses d’évolution parfois étonnantes, et surtout à éviter des scénarios trop roses ou trop noirs.
- Transformer ces scénarios en petites histoires, incarnées par des personnages, afin de concrétiser ces futurs possibles. Pourquoi 2040? Parce que ça laisse 20 ans devant nous, ce qui est à la fois assez long pour opérer des changements majeurs, mais assez court pour que nous soyons capables de nous y projeter.
Quels sont les fruits de cette étape?
Pour chacun des 3 défis :
- Un diagnostic prospectif, qui fait ressortir les tendances lourdes ou plus émergentes, des nœuds du futur et des constats sur la situation actuelle.
- 4 courts récits, qui incarnent différents futurs possibles en jumelant les tendances documentées dans le diagnostic prospectif de chaque défi.
Futur souhaitable
L’objectif de cette deuxième étape est de choisir collectivement, parmi toutes ces évolutions possibles, le futur qui nous semblait le plus souhaitable à l’horizon 2040.
Comment on s'y prend?
- Organiser une série d’« ateliers de codesign », avec des centaines de personnes ayant des profils les plus diversifiés possibles (région, âge, organisations, etc.). Chacun des ateliers permet aux participantes et participants de se plonger dans le futur, à l’aide d’un des récits développés à l’étape précédente, afin d’identifier les éléments clés d’un futur souhaitable et les points de tension à anticiper.
- Synthétiser le fruit de ces ateliers au sein d’une vision 2040 : Si ces discussions font évidemment ressortir des visions hétérogènes de l’avenir, l’équipe fait émerger suffisamment de zones de consensus sur chacun des défis pour proposer une vision collective. Elle y intègre aussi certains points de tension identifiés lors des ateliers, avec l’objectif de trouver le meilleur équilibre possible à l’horizon 2040. Par exemple, comment concilier densité de population, verdissement et qualité de vie individuelle? D’ici 2040, à quel point devrions-nous conserver une liberté de se déplacer (même à l’international), de manger les aliments qui nous font plaisir (même du café et des bananes!) et de profiter des outils numériques (même pour nos loisirs?)
- Faire valider cette vision par un comité expert. Un comité expert est ensuite créé, composé de professionnelles, professionnels et de scientifiques dont les expertises combinées permettent de couvrir les différents acquis de la vision. Leur première mission? S’assurer que la vision reste dans le champ du possible à l’horizon 2040, tout en respectant les éléments jugés souhaitables par les participants des ateliers de codesign
Quel est le fruit de cette étape?
- Pour chaque défi, une vision 2040 du futur le plus souhaitable possible pour 2040. Elle est structurée en 3 ou 4 « acquis du futur», fruits du chemin de transition que nous aurons parcouru en 20 ans. Mis en synergie, ces acquis forment le socle d’une société profondément différente, qui a réussi à relever le défi étudié.
Chemins de transition
L’objectif de cette étape est d’élaborer des trajectoires permettant de lier la situation actuelle au futur souhaité.
Comment on s'y prend?
- Lister les « jalons », qui sont des étapes intermédiaires qui doivent être franchies entre 2020 et 2040 pour lier le présent au futur souhaité. En plus des membres du comité expert de chaque défi, des groupes de discussion sont organisés pour que cette liste soit la plus exhaustive et pertinente possible. Une centaine de professionnelles, professionnels et scientifiques ont été réunis dans le cas du défi territoire.
- Identifier les liens entre ces jalons. Nous mettons ensuite au défi notre comité expert d’interrelier ces étapes : quels jalons sont des prérequis à d’autres? Lesquels pourraient faciliter une autre étape, sans être nécessaire à son atteinte? Un exercice cognitif intense, considérant que nous avons une soixantaine de jalons pour relever le défi alimentaire et près de 70 pour le défi territoire!
- Documenter chacun de ces jalons, pour identifier notamment les différentes stratégies d’action possibles pour l’atteindre, les actrices et acteurs concernés, la situation actuelle ainsi que les principaux freins et leviers anticipés.
- Positionner ces jalons dans le temps, en considérant non seulement les étapes préalables à d’autres, mais aussi le degré de difficulté que représente l’atteinte de chaque jalon. L’équipe s’assure ensuite que les parties prenantes concernées par chaque jalon n’aient pas trop de jalons à atteindre simultanément sur la trajectoire, afin de répartir le plus possible l’action de chacun dans le temps… bref, un beau casse-tête temporel!
- Mettre à l’épreuve notre chemin avec des contraintes actuelles (p. ex. contexte de pandémie et de pénurie de main d’œuvre).
- Explorer des trajectoires alternatives en anticipant des risques potentiels à venir. Par exemple : « Et si les ressources se raréfiaient plus vite que prévu dans notre chemin? » « Et si certains acteurs clés à l’échelle mondiale ne jouaient pas le jeu de la transition? »
- Enrichir la liste de nœuds du futur, tout au long de cette dernière étape, et la faire valider par le comité expert en fin de parcours. Et surtout, contrebalancer très vite cet exercice difficile par une discussion sur nos sources d’espoir, afin de conserver confiance en notre pouvoir d’agir!
Quel est le fruit de cette étape?
Pour chaque défi :
- Un rapport « final » incluant :
- Une présentation du défi et de la vision du futur souhaité;
- Un chemin de transition possible, présenté d’abord par blocs thématiques afin que cette trajectoire soit plus appropriable par les acteurs et actrices de la transition, et qu’on puisse mieux comprendre le lien entre les jalons. Ce chemin est aussi décliné par catégorie d’acteurs (p. ex. gouvernements, entreprises, société civile, etc.);
- Des bifurcations potentielles de ce chemin, tirées des discussions avec le comité expert de chaque défi lors de l’analyse des contraintes possibles à venir;
- Une liste de nœuds et de sources d’espoir.
Les rapports finaux des défis territoire et alimentaire suivront
- Une fiche sur chacun des jalons, qui explique son importance dans la trajectoire proposée, identifie les types de parties prenantes concernées, les stratégies d’actions pour y arriver, les freins et leviers, ainsi que des questions irrésolues et des ressources clés.
Les fiches jalons des défis territoire et alimentaire suivront
Partage des savoirs
L’objectif de cette étape, qui se poursuivra au moins jusqu’en 2025, est de partager non seulement les chemins de transition, mais également la méthode qui a permis de les élaborer.
Comment on s'y prend?
- On priorise les groupes et les organisations qui ont notamment le potentiel de partager ces résultats au plus grand nombre, ceux qui réalisent un exercice de planification lié à la transition (p. ex. feuille de route régionale, plan stratégique, politique ministérielle, etc.), et évidemment nos propres communautés, dont les étudiants de l’Université de Montréal et les visiteurs des musées d’Espace pour la vie.
- On élabore des activités adaptées aux besoins de chaque public, selon les besoins (p. ex. focus sur un jalon précis ou les étapes qui sont liées à un type de partie prenante, discussion autour d’un nœud du futur, atelier d’élaboration d’une vision basée sur nos récits, etc.).
- On assure un suivi pour mesurer nos impacts, s’améliorer en continu et faire connaitre les belles histoires de transition.